Comment sauver la télévision publique?

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Derrière ce titre provocateur se cache une réalité : avec l’avènement de la TNT et de ses nombreuses chaines de télévision, la part de marché des chaines de la télévision publique (France 2,3 et 5 notamment) ne cesse de baisser.

Cet élément conjugué à la perte de revenus publicitaires après 20h promulguée durant le mandat Sarkozy aboutit à une équation économique de plus en plus difficile pour la télévision publique, au point que celui-ci annonce un déficit de 40m € sur l’exercice 2013.

La télévision publique n’est donc officiellement plus un actif mais un passif pour l’état au sens où cela ne génère pas de revenus mais coûte au contraire de l’argent comme l’éducation, la santé ou la sécurité.

La télévision publique

En cette période de crise économique, de déficit public qui explose, nous sommes en droit de nous poser la question : veut-on que l’état finance des programmes de télévision avec nos impôts ?

Le débat qui veut opposer rigueur économique et l’investissement pour la croissance n’a aucun sens : ce n’est pas l’un OU l’autre mais l’un ET l’autre qu’il faut faire. En clair, l’état doit non seulement mettre en place les mécaniques permettant de relancer la croissance mais aussi et surtout réduire ses dépenses :

L’éducation ? Même si l’argent ne fait pas tout, ça doit au contraire être une priorité absolue.

La santé ? il peut y avoir des économies à faire mais le coût social est élevé et les hôpitaux sont déjà dans un état limite.

La sécurité ? La défense ? L’agriculture ? Les transports? La culture?

La notion de service public

En quoi la télévision est aujourd’hui un service public ? Que l’état s’occupe de défense, de santé ou d’éducation c’est tout simplement indispensable afin de ne pas se retrouver dans un système ou l’éducation n’est possible que si on peut contracter le crédit qui va avec, ou que l’on ne vous soigne que si c’est « rentable »

C’est ce qu’on appelle le domaine régalien de l’état, à savoir les fonctions « de base » que seul lui est capable d’assurer dans de bonnes conditions, alors en quoi ces chaines de télévision apportent une réponse plus pertinente que les désormais très nombreuses chaines de télévision privées au point de justifier que ce soit l’état qui en soit le principal voir unique actionnaire?

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Michel Drucker dans Champs Elysées II – Le retour

Un peu d’histoire

Historiquement, l’état s’est occupé de la télévision afin d’offrir à nos concitoyens l’accès à l’information et au divertissement par l’exploitation d’une évolution technologique qui bouleversa la vie des Français et des autres pays durant les années 50-60 : il fut alors crée l’ORTF dont la mission était de proposer des programmes de télévision et de radio sous une même bannière et d’installer les infrastructures lourdes et novatrices de l’époque comme les antennes relais un peu partout afin de permettre la couverture du territoire, était donc née la télévision publique sous sa forme moderne.

C’est un peu comme si, à la place de vendre des licences 4G ou fibre optique aux opérateurs téléphoniques actuels, l’état s’occupait lui-même de l’installation, faute d’entreprise privée pouvant le faire.

L’ORTF fut ensuite démantelée en 1974 pour donner vie à plusieurs entités séparées : Radio France (France Inter, France Musique, France culture…) pour la radio, ainsi que 3 chaines de télévision publique : Antenne 2 et 3 et… TF1 qui fut jadis une télévision publique, privatisée une décennie plus tard, en 1987 et devenant au passage le premier groupe de télévision en Europe depuis.

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L’horloge, un des programmes phares de l’ORTF…

Le reste de l’histoire vous la connaissez, Antenne 2 et 3 deviennent France 2 et 3, la naissance de la cinq et Arte… jusqu’à la situation actuelle ou le champs télévisuel est peuplé d’une vingtaine de chaines gratuites sur la TNT se battant toutes pour attirer les parts d’audimats synonymes de revenus publicitaires.

A partir du moment ou télévision publique et privée cohabitent, elles sont en concurrence, elles doivent donc générer toujours plus de revenus publicitaires afin d’investir dans des programmes qui rapportent de l’audimat, qui attire les publicitaires, qui financent des programmes qui attirent la publicité… c’est donc bien une course à l’audimat à laquelle se livre la télévision publique.

Le rôle de l’état

Maintenant que les infrastructures sont en place et que l’information est accessible des villes aux campagnes et ou la quasi-totalité des Français ont ou peuvent avoir un accès à internet, en quoi est-ce encore un problème de l’état que de s’occuper de télévision ?

L’état apporte-t-il un service que les chaines privées ne peuvent offrir ? Je ne crois pas.

Ceux qui pensent à la qualité des programmes et l’accès à la culture n’ont qu’à regarder les programmes de ces chaines de télévision : jeux, talkshows, téléfilms, séries ce sont exactement les mêmes que ceux des télévisions privées, peut-être l’argent en moins : on gagne 10000€ sur TF1 en donnant la couleur du cheval blanc d’Henri IV contre une Cafetière à 80€ en additionnant 2+1 sur France 2 (Je caricature à peine) la champions league sur canal+, la coupe de la ligue sur France 2/3/4. Desperate Housewives sur M6, Louis la brocante sur France 3.

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Derrick, une icône de la télévision publique

Quand bien même l’état voudrait distiller des programmes spécifiques, qu’il jugerait de qualité, n’est-ce pas dans les pires dictatures que l’état décide de ce qui doit arriver aux oreilles de son peuple ? Est-ce à l’état de définir ce qu’est un programme, une émission ou une œuvre artistique de la qualité ? Le tube de l’été ou les suites pour violoncelles de Bach par Rostropovitch ?

La télévision publique dans d’autres pays est malheureusement un vecteur de dictature et de désinformation massive :

Je précise que je ne compare pas France télévision à la TV nord coréenne… cette dernière étant manifestement plus drôle.

Doit-on supprimer les groupes de télévision publique ?

Non. Je n’ai rien contre ces groupes, ni contre radio-France ni contre ses salariés qui font un travail remarquable dans des conditions souvent plus compliquées que sur le privé.

Je pense d’abord que la loi supprimant la publicité sur la télévision publique est une aberration monumentale car elle la prive de revenus très importants occasionnant des coupes budgétaires, une baisse de la qualité des programmes et surtout diminue ses capacités d’investissement comme souvent lorsqu’une entreprise rencontre des difficultés financières.

Ensuite, je pense qu’une privatisation permettrait justement de redonner de l’oxygène au groupe, lui permettrait d’investir et de lutter à armes égales avec les chaines privées avec lesquelles qu’elles le veuillent ou non, elles sont en concurrence frontale et contre lesquelles elles ne cessent de perdre du terrain. Cela permettrait à l’état d’effacer un déficit qui risque de devenir récurrent tout en renflouant ses caisses avec la vente à des actionnaires privés qui serait fortement valorisée étant donné la part de marché toujours importante de France Télévision par ex. Pour l’instant.

Enfin, rappelons que nous payons tous un impôt afin de financer la télévision publique : la redevance télévisuelle, 129€ / an par foyer qui est un impôt injuste car si à l’époque on pouvait dire qu’utiliser une télévision revenait à regarder la télévision publique, c’est aujourd’hui tout sauf vrai. Plus de télévision publique ne supprimerait pas l’impôt mais le diminuerait fortement (il y a la radio déjà, et des organismes d’audiovisuel comme l’INA)

En cette période ou l’état doit se repenser, changer, s’adapter aux enjeux économiques actuels, l’état doit se concentrer sur ses missions régaliennes : il n’en sera que plus efficace et donc plus juste, plus solidaire là où nous en avons besoin de lui.

Pour finir, je citerai Pierre Desproges qui avait bien compris dés la privatisation de TF1 que la course à l’audimat était l’unique moteur de la télévision publique ou privée en déclarant : « d’état ou pas, la télévision c’est comme la démocratie : c’est la dictature exercée par le plus grand nombre sur la minorité ».

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7 réponses

  1. @Alcofibras : Personnellement et même si cet avis n’engage que moi, je pense que l’état et la culture n’ont rien à faire ensemble.

    C’est le réflexe de la France jacobine et centralisée que de vouloir tout contrôler d’en haut, nous avons un ministère pour la culture, un ministère pour le sport… ce qui constitue une exception et des pays bien plus développés sur ces deux aspects en sont dépourvus (USA notamment)

    Evidemment les chaines que vous avez cité proposent « une autre vision » de la télé ou de la radio, mais sur un plan strictement démocratique, trouvez-vous normal de faire payer une grande partie des français pour un service qu’ils n’utilisent pas ?

  2. Alcofibras dit :

    « l’état s’occupait lui-même de l’installation, faute d’entreprise privée pouvant le faire. »

    Avez-vous l’état (avec un « é ») des infrastructures téléphoniques depuis la « déréglementation » ? Quand vous voyez des gens travailler autour d’un trou en ville, allez voir. Il se peut que ce soit un regard sur ces infrastructures. Inquiétant !

    Quant à avoir Arte, la Cinq, France culture, France Musique… sans l’impôt (et pourquoi pas la pub pour assurer le complément de financement) il ne faut pas rêver. Certes ce n’est pas ce qui plait au plus grand nombre. Et comme en France on n’est pas habitué à payer comme aux USA, je pense qu’aucune entreprise privée pourrait assurer ce « service ». Attention ! on risque se retrouver comme l’Europe avec le GPS en matière culturelle.

    Vous pourriez aussi poser la question de toutes ces manifestations culturelles financées par les municipalités, etc sur l’impôt et le statut unique au monde des intermittents du spectacle.

    Aux USA, au R.U. allez voir combien les anciens donnent à leur « alma mater », à leur ancienne université. Comparez avec la France. Voir aussi le financement privé par le don de tas d’activités qui en France sont financées par l’impôt.

  3. La télévision est en cours de mutation.
    On le voit de plus en plus, les émissions de télévision font une passerelle avec Internet.

    On se dirige de plus en plus vers l’avènement de la télévision connectée.

  4. Je viens de découvrir cet article détaillé sur le service public, et plus précisément la télévision.
    J’avoue ne pas regarder beaucoup la télévision, mais dans un sens, je me sens pas concerné par les émissions

  5. La télévision sous sa forme actuelle ne va pas durer. Mais ele va s’adapter pour survivre.
    Et c’est ce que doit faire la télévision public, qui est à mon sens, un réel plus dans notre patrimoine.

  6. Moi, je choisis toujours les chaînes qui émet des bons films, et je crois que c’est pour ça que d’autres chaînes à pu réussir de gravir l’échelon, merci beaucoup pour l’article

  7. 
    Votre billet est très intéressant et je viens du coup le relayer à une consoeur qui semble être d’accord avec vous et je suis sûre qu’elle m’en sera reconnaissante.

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